2600 jours

Publié le par sHy

Et  je tourne la page: celle ci.

 

La page de la baie vitrée. Celle par laquelle je regarde dehors depuis deux ans.

 

Je suis là pourtant, assise devant la vitre. Pour quelques heures, quelques minutes encore à chercher le ciel.

 

L'habitude avait pris le pas sur mes désirs profonds. Mon corps avait pris racine sur cette chaise, devant cet écran. Mais mon regard, lui, a toujours scrupté l'horizon.

 

J'ai passé ma vie ici, de longues journées, de longs moments. Une sorte de deuxième maison ou j'ai passé quelque temps. J'ai déjà pris mon petit déjeuner ici. J'ai résilié mes contrats ici. J'ai passé des commandes personnelles et même pris des rendez vous médicaux pour y aller en courant après la sortie.

 

Payée 35h, j'étais pourtant là 42h par semaine, comme par erreur et pour garder cette place, je ne m'en suis jamais plaint. 42h... presque 170h par mois. 62 050h par an... presque 2600 jours mes ami(e)s à vivre ici.

Par tous les temps. Je regardais dehors quand j'en avais le temps et j'observais la vie s'écouler pendant que moi, j'étais enfermée ici. Pendant que j'attendais d'être libérée.

Mais les jours défilant, j'ai oublié que j'attendais et maintenant que la cage s'ouvre, je me demande comment c'est dehors. Je ne me souviens plus.

 

Quand on retient un animal en cage, il doit sûrement ressentir cette sensation là. Il sait que sa vie passe malheureuse mais il attend, dans l'espoir infime qu'il sortira peut être un jour et qu'il reverra le ciel.

Et plus le temps passe, plus il s'habitue à être en cage mais le jour ou la cage s'ouvre, l'habitude est si grande qu'il n'ose plus en sortir.

Il pense que vivre en cage, c'est normal.

 

Mes débuts ici étaient difficiles, je ne pensais jamais tenir moralement. Mais les jours se sont écoulés et le devoir de rentrer mon petit salaire m'a fait rester encore. Alors j'ai attendu jusqu'au jour ou je n'ai plus attendu. J'ai cru que c'était ça la vie, que cette vie là était sûrement la vraie vie, terne et monotone, un devoir de tous les jours. Une obligation.

 

Le piège de " l'habitude". Du " connu". Le " quotidien", les gestes " répétés", la vie "identique de jour en jour" nous laisse imaginer que cette vie là est bien et même juste.

 

Demain je sors mais vais je y croire ? Libérée, il me faudra du temps avant de le réaliser. De me rendre compte que je ne travaillerai plus jamais autant d'heures du moins, un " vrai 35h ", je n'ose vous dire mes horaires ici ..

 

Terminer à 17h ? Ce sera presque trop beau pour y croire..

Alors,

Que ferai je de ma vie une fois à l'extérieur ?

 

Que vais je faire pour savourer ma liberté retrouvée ?

 

 

 

 

 

 

 

Publié dans défi coeur

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